PHILOSOPHIE
IV. PHILOSOPHIE PREMIERE
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Socrate - Introduction - Philosophie du Vivant - Philosophie morale - Philosophie première - Philosophie de la communauté

 

“Première”: (A) elle nous permet d’atteindre et de connaître Celui qui est ‘Ipsum esse subsistens’. (B) elle est autonome relativement à toutes les autres parties de la philosophie; en ce sens, elle est “tête et coeur” de toute la philosophie ... mais, “pédagogiquement” seconde, car la maturité intellectuelle qu’elle exige – l’effort de pénétration au-delà du sensible, d’où son nom de métaphysique – implique d’avoir un bon habitus philosophique ... de s’être formé au travers des grandes inductions , en particulier, celle de l’âme, en Philosophie du Vivant.

Trois parties la composent:
* “Via inventionis”: découverte par induction des causes propres et des principes propres de ce qui est en tant qu’être;
* Théologie naturelle: preuves de l’existence d’un Etre premier et attributs divins;
* Critique: partie réflexive impliquant auto-critique et classification des impasses dans la recherche d’une vraie sagesse.


VIA INVENTIONIS

L’expérience, les expériences multiples et diverses (philosophiques, scientifiques, utilitaires, affectives, etc), de ce qui est nous mettent en présence de ce qu’il y a de plus universel (rien n’y échappe!) et de plus profond (simple, “primitif”) dans ce qui est en tant qu’être : l’exister-existence -- les déterminations -- le devenir .

L’EXISTER-EXISTENCE … le fait d’être-exister que je constate (irréductible à mon assimilation intentionnelle) …
-- Jugements d’existence : ceci est-existe, j’existe, mon ami (l’autre personne) existe… l’intelligence rejoint, saisit, touche l’existence de ces “étant” --- de ‘ceci’, de ‘je’, de ‘l’ami’--- dans un jugement ; le jugement “ceci existe” implique que le “ceci” présente une certaine autonomie d’existence et de déterminations… l’autonomie d’existence du vivant ( je - l’ami - tel animal, ...) est manifeste et sa mort la confirme. Distinguons vie et exister ... je possède ma vie et je puis me l’enlever ... mais, je ne possède pas mon exister (qui subsiste post-mortem’).
-- Notre connaissance sensible est la médiatrice nécessaire entre notre intelligence et les “étant”… les sens (particulièrement le toucher, sens racine-source) sont les fenêtres ouvertes sur les “existe-est”. C’est la raison pour laquelle l’existence des réalités immatérielles, donc non saisissables par les sens (ainsi: les anges), échappe au philosophe et au savant… cette existence peut être niée dans un jugement a priori, non fondé en vérité .
-- En physique: l’existence d’une nouvelle particule, que l’intelligence théorique découvre-suppose-prévoit, doit être vérifiée, constatée en laboratoire pour que celle-ci soit reconnue comme existante en réalité (les techniques sophistiquées ne font que prolonger nos sens, en mettant l’accent sur le mesurable).
-- Seule l’Existence de l’Etre premier (“Celui qui suis”), Esprit pur, peut être affirmée-conclue par l’intelligence, bien que l’Etre premier n’entre aucunement dans la connaissance sensible (cf. les preuves de l’existence de l’Etre premier en Théologie maturelle) .

Les DETERMINATIONS… la “forme” : ce en vertu de quoi un étant-existant est dit être tel…
-- Les déterminations sont saisies au terme de la simple appréhension par “assimilation intentionnelle” (même si cette saisie implique une élaboration intellectuelle préalable et très complexe… cf. les concepts liés aux diverses particules saisies-découvertes en Physique ) ; elles se présentent comme stables, isolées du devenir… au cours du devenir de tel “étant” certaines déterminations demeurent, d’autres changent.
-- Diversité extrême de déterminations… Les ‘dix catégories’ explicitées par Aristote mettent un ordre dans cette diversité: la quiddité (quid est ? Pierre est homme ... substance seconde), la (les) qualité(s), la quantité, la relation, l’action, la passion, le lieu, le temps, la position, l’avoir ... Dans tel ou tel “étant”, une unité plus ou moins cohérente, harmonieuse, se présente entre ses déterminations… en l’homme se présente la plus grande richesse et diversité de déterminations (du corps à l’esprit), en même temps qu’une forte unité.
-- A partir de certaines déterminations fondamentales, primitives, l’intelligence peut (librement) construire tout un édifice sophistiqué de déterminations fort éloignées de la connaissance sensible (cf. l’univers mathématique ... ).

Le DEVENIR… tout devenir - changement, y compris celui propre aux vivants ( les opérations vitales à tout niveau, la vie et son exercice)
-- Le devenir est-existe : le concept d’être doit l’inclure… Le devenir est original non réductible à la liste des changements de déterminations au cours du devenir (les arguments de Zénon d’Elée s’appuyaient sur cette liste, que l’on peut manipuler logiquement, pour nier le devenir)… il est vécu de l’intérieur pour le vivant… tel ou tel “étant” devient : vie biologique ou spirituelle d’un vivant ... “vie” d’une étoile ou d’une galaxie ... évolution de l’atmosphère ou de l’hydrosphère terrestres, etc.
-- Le devenir est ordonné, orienté… le développement du vivant ordonné à son épanouissement (conservation de la vie, de l’espèce), le développement du vivant de vie spirituelle ordonné à son épanouissement véritable (contemplation, amitié, justice, création artistique, etc), nous le manifestent à l’évidence… l’existence même des “lois scientifiques” manifeste cette orientation, cette “prévisibilité” du futur (même si des marges d’indétermination, de non-prévisibilité, demeurent… la réduction au “mesurable” de l’être physique implique ces limites, signes que l’être physique a son originalité propre)…. il n’existe pas de “devenir pur” (chaos sans aucune intelligibilité).

EXISTENCE - DÉTERMINATIONS - DEVENIR coexistent en tout ce que nous pouvons expérimenter… ils se distinguent sans s’exclure… Tout “étant” implique détermination(s) et devenir (plus ou moins ordonné, orienté): (1) les “étant” physiques demeurent immergés dans le devenir physique, soumis à de multiples dépendances et interactions… leur autonomie d’être (existence et déterminations) est très relative (même pour les étoiles à l’échelle des milliards d’années); (2) les “étant” de vie animale et de vie végétative ‘élaborée’(un chêne) connaissent une autonomie d’être plus manifeste (à l’échelle de temps qui est la leur); (3) l’homme représente en sa vie spirituelle un sommet d’autonomie d’être ... il franchit les frontières de la mort!.
Une affinité manifeste se présente entre ‘existence-détermination-devenir’ et (resp.) jugement - appréhension simple - raisonnement ... voire :     

Addenda : diversité et richesse des expériences que l’homme peut faire :
* L’intelligence domine: (1) l’affectivité sensible est ‘mise sous le boisseau’ ... connaissances dites objectives, universelles, rôle de l’induction ... expériences soit philosophique (métaphysique), soit scientifiques (liées au mesurable). (2) l’affectivité sensible pénétre profondément la connaissance ... expériences artistiques, ‘du faire’, toujours singulières et peu communicables.
* L’affectivité domine : (1) affectivité volontaire ... conmaissance sensible rectifiée-mesurée ... expérience de l’amitié. (2) affectivité sensible ... connaissance sensible ‘envahissante’ ... expériences passionnelles.
N.B. La vie mystique unit affectivité volontaire et connaissance intellectuelle pneumatisées, c.à.d. prises sous la Motion de l’Esprit Saint.


PRINCIPE - CAUSE PROPRE SELON LA FORME (la détermination) DE CE QUI EST EN TANT QU’ETRE

Ceci est-existe: d’une part, la distinction-opposition relative entre le “ceci” (la-les détermination(s) - forme(s) assimilée(s) par l’intelligence au travers de la connaissance sensible et se donnant sous un mode universel) et le “est-existe” (toujours singulier , irréductible à l’ assimilation intellectuelle), et , d’autre part, l’unité du “ceci est”, nous permet-exige de saisir, d’induire, un principe - source réel du “ceci”, de son intelligibilité, et de son “exister”. Ce principe-cause est appelé SUBSTANCE (en grec ‘ousia’) ... détermination la plus fondamentale, première, du ‘ceci’ (non immédiatement expérimentée, mais ‘porteuse des autres déterminations expérimentées, dites accidentelles) ... source-porteuse de l’exister du ‘ceci’, de son autonomie existentielle (la substance est ‘ens per se’ ... capable de garder l’exister reçu ... elle n’est pas ‘ens a se’, “exister” par elle-même.)
Nous ne pouvons pas affirmer avec certitude que tout “ceci” est substance, car l’autonomie existentielle du “ceci” ne nous est pas clairement manifeste : (a) L’être physique est comme immergé dans le devenir, dans la diversité des interactions … ce que nous pouvons induire est une “nature” (cf. Philosophie de la nature)… les énergies gravitationnelles, électromagnétiques, nucléaires sont-elles substantielles ? (b) le jugement “cet animal existe” nous situe entre le “ceci (physique) existe” et le “Pierre existe”… il semble difficile de nier tout principe substantiel en l’animal (…un éléphant…) et cependant l’affirmer avec certitude est douteux, car son exister (celui d’un éléphant…) est perdu à la mort (son âme n’étant pas immatérielle, à l’image-de-Dieu)… mais, l’espèce perdure! (c) réflexion analogue pour les éléments, terre-eau-air-feu, et la vie végétative ... (Que trouverons-nous dans la création renouvelée ? )
En toute certitude, nous pouvons affirmer qu’en tout homme existe un tel principe substantiel, en conséquence de son immortalité. Il existe une analogie entre les inductions de la substance, principe d’être, et de l’âme humaine, principe de vie. “In via”, la substance “pénètre” corps et âme… à la mort, elle s’identifie à l’âme (appelée forme substantielle du vivant-homme)… à la résurrection de la chair, substance et âme se distinguent de nouveau.
L’analyse du jugement “j’existe” permet d’induire la substance: d’une part, la distinction - opposition relative entre le “je”, le moi, ce que je suis (comme être physique, être vivant de vie spirituelle... toutes les déterminations particulières, que je touche, expérimente), et, d’autre part, mon “exister”,, et l’unité du “j’existe”, permet-exige d’induire un principe - source - support du “je” (de mes déterminations particulières, expérimentables), apte à recevoir et garder l’exister reçu (“reçu”: je ne suis pas mon exister… je ne fus pas et je fus), et principe d’unité du “j’existe”. Ce principe (réel) est appelé SUBSTANCE ; détermination profonde, non immédiatement expérimentable, porteuse des autres déterminations et de mon exister.

Mon ami est-existe: mon exister et l’exister de mon ami sont irréductiblement distincts – nous touchons là “l’égoïsme métaphysique” de tout homme –, et cependant une “unité affective” très forte existe: celle de l’amour d’amitié. Cette expérience la plus riche, la plus profonde, nous manifeste que la substance ne clôt pas l’existant, la personne, sur elle-même… malgré “l’égoïsme métaphysique” si radical, l’ouverture et l’accueil de l’autre est possible…
La substance implique ouverture, capacité d’accueil de l’autre, et capacité d’orientation vers l’autre.

La SUBSTANCE est ce par quoi ce qui est:

* est-existe: “ens per se”, être par soi, c’est-à-dire capable de garder l’exister reçu – [la substance de tel étant-existant est créée à l’instant même où l’étant-existant reçoit son exister] –; les substances que nous découvrons par induction ne sont pas “ens a se”, c’est-à-dire qu’elles ne se donnent pas à elles-mêmes leur exister;
* est ce qu’il est: détermination la plus profonde, cachée, du “je”, du ‘ceci’ – non immédiatement expérimentable, ce pourquoi elle a pu être niée… ainsi en est-il déjà de l’âme humaine (cf. Philosophie du vivant) –- appelée détermination substantielle; détermination la plus spécifique du “je”, du ‘ceci’, au-delà de toutes les déterminations saisissables par la connaissance sensible ou par la connaissance scientifique. La substance remplit une double fonction: celle dite “quidditative”, de répondre de la manière la plus profonde, la plus ultime, à la question “Quid est?” – “Qu’est-ce” – posée par l’intelligence en face d’un étant-existant, et, celle d’être “sujet”, capable de porter les autres déterminations dites accidentelles.

L’induction de la substance se situe dans la ligne de la simple appréhension.
Nous pouvons formuler le jugement suivant:
Principe d’identité: “Tout étant-existant implique détermination”; ou, plus en profondeur: “Ce qui est (subsiste… la substance), est nécessairement (la substance ne peut perdre l’exister reçu… le Créateur peut l’annihiler ( cf problème de la création) … mais, par elle-même, elle ne peut perdre l’exister reçu)”.

LES DETERMINATIONS ACCIDENTELLES
Les “accidents”, c’est-à-dire les déterminations autres que la substance, subsistent en et par la subsistence de la substance – le propre de la substance est de subsister par elle-même… la subsistence désigne la manière d’être de la substance et non une propriété surajoutée –; “unité subsistentielle” de la substance et des accidents.
Les accidents se classent en trois catégories:
(A) les qualités – ce en vertu de quoi un être-étant est dit “être tel” – à savoir:
* les qualités sensibles propres;
* les facultés (intelligence, volonté) et puissances (concupiscible, irascible) du vivant;
* les sensations et les passions, les habitus et les vertus; (habitus d’ “intelligence” regardant la saisie des principes ... de science(s) regardant les divers cheminements dans la conquête des diverses vérités .... de sagesse regardant les conclusions ... de prudence regardant l’agir humain ... d’art regardant le ‘faire’ );
* l’amour d’amitié et la contemplation;
* les qualités propres au corps vivant (beauté, etc) et toutes les qualités propres aux corps physiques.
Les qualités du vivant lui permettent d’atteindre sa fin (conservation et épanouissement de l’individu, conservation de l’espèce); les qualités du vivant - homme lui permettent d’atteindre sa fin, sa béatitude naturelle – la qualité est ce qui unit l’être substantiel à sa fin, ce qui introduit la substance dans l’ordre du bien; plus un être est qualifié, plus il est intériorisé et plus il est capable de se communiquer. Les qualités des corps physiques, par leurs interactions, unifient et harmonisent l’Univers.

(B) la quantité, c’est-à-dire les qualités sensibles communes saisies pour elles-mêmes soit comme divisibles (lignes, surfaces, volumes) soit comme nombrables; la quantité est coextensive à la matière (c’est pourquoi une étude quasi-exclusivement quantitative de la matière – voir la Physique – n’est pas sans intérêt!): là où il y a matière, il y a quantité; la quantité, le divisible et le nombre, est un accident nécessaire du monde matériel. La quantité est principe d’individuation et d’extériorisation des corps.

(C) la relation, “pur regard vers” (le “ad” latin) représente l’être le plus pauvre, le plus tenu, “accident des accidents”; on distingue des relations dites réelles: entre les hommes (paternité, filiation, relations conjugales ou d’amitié), entre l’homme et la communauté (relations de bienveillance, de justice, etc), entre l’homme et son environnement (milieu vital, univers physique), entre l’homme et l’Etre premier (adoration… relations qui ne sont réelles que du côté de l’homme), et des relations dites de raison (dans les domaines logique et mathématique…En Mathématique, nous trouvons un mixte original de la quantité (très épurée) avec la relation de raison.). La relation et la quantité numérique s’appliquent, existent, bien au delà du monde matériel… conjoints à la substance, elles permettent de donner quelques lumières sur le Mystère de la Très Sainte Trinité!

Le principe de non-contradiction: “Un même ‘étant’ ne peut pas ‘être et ne pas être’ en même temps et sous le même rapport”; ce principe exprime la cohérence profonde de l’être-existant en ses déterminations et, par conséquent, l’intelligibilité profonde de l’être (sa négation ruinerait toute connaissance, tout langage, toute communication).


CAUSE PROPRE SELON LA FIN DE CE QUI EST EN TANT QU’ETRE

L’expérience du devenir est d’une très grande richesse : devenir des réalités matérielles, de l’Univers physique de l’infiniment petit à l’infiniment grand; devenir des vivants de vie végétative et animale (naissance, croissance, mort… opérations vitales); devenir du vivant - homme en sa vie spirituelle (acquisition de la vérité, des vertus, approfondissement et croissance en l’amour, etc) et dans ses relations à autrui, aux autres hommes (‘exercices’ de l’amour d’amitié, de la justice, de la miséricorde, d’une profession-métier, etc). Tout ce que nous expérimentons, vivons, implique devenir (sauf la fine pointe de la contemplation métaphysique et, parfois, un “repos extatique” dans l’amour d’amitié)… ‘je’, nous, sommes immergé de multiples manières dans le devenir ... le devenir est-existe et la notion d’être ne peut l’exclure.
Le devenir et la détermination sont distincts et dans une relative opposition: la (les) détermination(s) pénètre(nt) le devenir, le structure(nt), mais le devenir n’est pas identifiable à la liste des déterminations variables et successives… il garde son originalité propre. La détermination – conjointement avec “l’acte” que nous allons découvrir – donne une certaine intelligibilité au devenir: cela est particulièrement manifeste au niveau du devenir physique-matériel et, dans une moindre mesure, au niveau du devenir biologique (voir l’efficacité des lois permettant de prévoir, en fonction du temps, les déterminations à venir… même si une marge d’incertitude – résultant du choix exclusif de la “mesure”, du “mesurable”, dans la connaissance scientifique, positiviste – peut se manifester); cela demeure manifeste au niveau du devenir spirituel (de l’éducation, de la croissance d’une vie digne de l’homme, de notre perfectionnement dans telle ou telle activité sportive, de l’enseignement pré-universitaire, jusqu’aux travaux originaux personnels ... ) même si la “lumière” des déterminations est très insuffisante pour éclairer ce devenir ... il manque le “pourquoi”, “en vue de quoi”(l’acquisition d’une ‘maîtrise’ en Physique nucléaire ... d’un pouvoir politique important ... d’une vie ‘d’honnête homme’- Image de Dieu ... la conquête des ‘8000’ ...) .

La fin, le ‘en vue de quoi - pourquoi’ , se manifeste avec force dans le devenir propre à l’homme, dans l’orientation qui en résulte, et que la fin gouverne . Notre vie spirituelle humaine, plus ‘globalement’ notre vie de vivant-homme, est ‘portée’ par une INTENTION DE VIE (plus ou moins forte) ... si nous sommes conscient, ‘lucide’, responsable de nous-même, de notre engagement libre. En cette vie, tissée par les ‘activités’ de notre intelligence et de notre volonté -- “Intelligence et volonté s’enveloppent mutuellement par leurs actes: car l’intelligence comprend que la volonté veut, et la volonté veut que l’intelligence comprenne,”(St.Th.d’Aq.) -- nous pouvons distinguer deux ‘pôles’ d’attraction: si l’intelligence est dominante : l’AMOUR DE LA VÉRITÉ ... en son sommet l’amour de la sagesse (naturelle); si la volonté est dominante: l’amour d’un bien, en son sommet l’AMOUR D’AMITIÉ... sans oublier que la vérité est un bien et que l’amour d’amitié est un amour vrai-intelligent (“Le vrai et le bien ...s’impliquent mutuellement, car le vrai est un bien, sans quoi il ne serait pas désirable; et le bien est un vrai, autrement, il ne serait pas intelligible.”(St.Th.d’Aq.).).
L’amour de la vérité implique: d’une part, tout un cheminement intérieur, une croissance, dans la vérité reconnue, acquise -- vérité formelle, celle que mon intelligence possède et qui résulte de l’adéquation de mon intelligence à la réalité saisie-connue -- et, d’autre part, la découverte, saisie inductive, de l’être dans sa dimension de vérité profonde ... vérité ontologique ... l’être en lui-même est vrai ... ce pourquoi, nous pouvons le saisir, le co-naître ... vérité formelle . Nous avons induit une modalité de l’Etre, de “l’Etre-en-acte” : l’Acte-vrai-vérité, qui gouverne, finalise, et donne son intelligibilité au devenir; l’Acte-vrai-vérité est CAUSE FINALE.
L’amour d’amitié : cet amour vécu, cette affection volontaire, que nous portons ‘en notre coeur’ et partageons avec notre ami, demande toujours à s’approfondir, s’épanouir ... il ne peut se fixer-figer sans mourir ... Cet amour est autre que la personne ‘existentielle’ de l’ami; cette personne est le bien ‘aimable-désirable’, qui m’attire ... dont le fruit est, précisément, cet amour d’amitié... on aime son ami, on n’aime pas l’amour nous unissant ! Nous avons induit une dimension profonde et ultime de l’Etre, de “l’Etre-en-acte”: l’Acte-bonté-bien, qui gouverne, finalise, et donne son intelligibilité au devenir; l’Acte-bonté-bien est CAUSE FINALE.

La fin, l’Etre-en-acte, oriente le devenir, le “gouverne” en profondeur, lui donne son intelligibilité profonde. La cause finale, cause des causes, se sert “politiquement”, proportionnellement, des causes efficiente (par quoi ... les ‘comment’ ...) et formelle (quoi); le rejet a priori de la cause finale réduit l’intelligibilité de ce qui est à la seule lumière des causes efficiente et formelle (l’univers des ‘comment’)… ce qui est acceptable pour le devenir matériel (voire biologique), mais est totalement inacceptable pour le devenir spirituel, propre à l’homme.
Le(s) jugement(s) d’existence --- ceci est - je suis - mon ami est-existe --- manifeste(nt) la transcendance (relativement aux déterminations et au devenir) du ‘est-existe’; nous découvrons-induisons la modalité d’acte immédiate-simple ... l’Acte-“esse” (exister) ... l’Acte-esse est CAUSE FINALE.
L’Etre-en-acte se manifeste sous trois modalités distinctes, non opposées : L’ACTE-VRAI, L’ACTE-BON, ET L’ACTE-ESSE ... L’Acte-esse, l’Acte-vrai, l’Acte-bien - distincts, mais non opposés - nous manifestent la richesse profonde de l’ETRE, de ce qui est en tant qu’être. Une affinité avec le Mystère trinitaire se manifeste : Père-Source -- Fils-Verbe -- Esprit Sanctificateur ... le ‘vrai’ est ordonné au bien, ‘appelle’ le bien ... le bien, en attirant, intensifie la recherche du vrai ... l’un et l’autre conduisent “au repos” dans la plénitude de “l’exercice” de l’esse !
Deux modalités secondaires, moins originales, car comme enfouies dans le devenir: l’acte propre au devenir physique, ‘inscrit’ dans l’instant présent, et l’acte propre au devenir du vivant, à savoir l’opération vitale, l’exercice ‘actuel’ des puissances et facultés vitales, appelé traditionnellement “acte second”. L’être-en-acte - notion analogique - “intègre” ces modalités sans les confondre; chacune a son originalité propre.
Corrélativement à cette saisie inductive de l’acte, nous découvrons l’ETRE EN PUISSANCE, la “puissance”, c’est-à-dire l’être capable d’être actué, d’être ce qu’il n’est pas encore… l’être capable d’achèvement, de perfection; l’être en puissance, ce “pouvoir être”, n’est pas identifiable au non-être, au néant… une telle identification conduirait à nier tout devenir, à ne saisir que “l’être immobile, figé” et à confondre devenir et création (au sens métaphysique, c’est-à-dire “ex nihilo”). Ainsi, l’intelligence est en puissance à la vérité; cette “potentialité” a pour conséquence: d’une part que l’acte-vérité, en soi “ouvert à l’infini”, est limité, “contraint” lorsqu’il est reçu; d’autre part, qu’en sa quête de la vérité, l’intelligence peut s’égarer, d’où la possibilité de l’erreur (métaphysiquement, l’erreur n’est qu’absence de vérité; psychologiquement, l’erreur a un “poids réel”). De même, la volonté est en puissance au bien; cette “potentialité” a pour conséquence: d’une part que l’acte-bonté, “ouvert à l’infini”, est limité, “rétrécit” lorsqu’il est reçu; d’autre part, qu’en sa recherche - disponibilité au bien, la volonté peut s’égarer, d’où la possibilité du mal (métaphysiquement, le mal n’est qu’absence de bien; psychologiquement, son “poids affectif” est réel). L’acte-esse nous fait découvrir aussi un rapport “acte - puissance”: la substance, être-par-soi, garde l’exister qu’elle reçoit… elle est en puissance à son “exister” reçu… mais, alors que l’intelligence et la volonté pré-existent aux actes qui les actuent, la substance ne pré-existe pas à l’exister qui l’actue.

Les rapports “acte - puissance” sont très divers :
La substance dans sa fonction sujet est en puissance aux accidents.
Nos facultés spirituelles sont en puissance à leurs opérations (appelées actes seconds)… ces opérations ne sont pas la fin ultime, mais elles sont nécessaires pour atteindre cette fin ultime : Contemplation, amour d’amitié.
Les passions, les vertus actuent les facultés appétitives (concupiscible, irascible, volonté).
L’âme actue le corps, faisant de celui-ci un corps vivant: elle est acte d’un corps ayant la vie en puissance.
Telle réalité physique est en puissance aux qualités physiques nouvelles que le devenir, auquel elle est soumise, va lui donner.

La division - distinction de l’être en acte et puissance est beaucoup plus profonde et ultime que celle de l’être en substance et accidents; elle recoupe même cette dernière… ce qui est normal lorsqu’on a saisi l’originalité, la “personnalité” de la cause finale relativement à la cause formelle. Et, de même que la cause finale unifie en orientant (rend convergent vers la fin, vers elle-même) et sépare de “ce qui déroute” de la fin, d’elle- même; ainsi, l’acte a pour fonction d’unifier et de séparer… l’acte-vérité unifie l’intelligence et la sépare de l’erreur… l’acte-bonté unifie la volonté et la sépare du mal.

Antériorités relatives de l’être-en-acte et de l’être-en-puissance:
L’être en acte est antérieur à l’être en puissance selon l’intelligibilité, la connaissance (l’induction de l’acte nous fait découvrir corrélativement l’être en puissance); et, aussi, selon la perfection de l’être, puisqu’il est acte - fin ... cause finale de ce qui est, donnant la “lumière” ultime, la plus profonde sur l’être. L’être en puissance est antérieur à l’être en acte selon le temps (ordre génétique): l’existence et l’universalité du devenir nous le manifestent. Nous pouvons définir le devenir comme étant: l’acte (actuation) de ce qui est en puissance en tant qu’il est en puissance (sous le rapport, où il est en puissance).

Ces antériorités relatives nous permettent de formuler le PRINCIPE DE CAUSALITÉ (universel, métaphysique): ce qui est en puissance est ordonné à (finalisé par) l’être en acte et dépend dans son devenir de l’être en acte.
Ce principe peut s’expliciter de manières diverses en fonction des modalités d’acte:
* les facultés et puissances de connaissance sont ordonnées à la vérité, et à l’acte-vérité le plus parfait, le plus achevé: la contemplation;
* les facultés appétitives sont ordonnées au bien, et à l’acte-bonté le plus parfait, le plus achevé: l’amour d’amitié;
* la substance est ordonnée à son “esse-exister”, qui l’actue parfaitement.
L’élément potentiel implique la possibilité de l’erreur, du mal et la “non aséité” (l’exister est reçu… la substance ne se la donne pas à elle-même).

Nous pouvons aussi expliciter:
* les facultés et puissances vitales (à tout niveau) sont ordonnées à leurs opérations… par les opérations, le bien - fin désiré est atteint… nous pouvons dire: tout agent (tout vivant) agit en vue d’une fin;
* si on considère le devenir physique, nous pouvons dire: ce qui devient, ce qui est mû, est mû par un autre… “jeu” des relations causes (efficientes) - effet


L’UN ET LE MULTIPLE, PROPRIETES DE CE QUI EST EN TANT QU’ETRE

L’expérience nous met constamment en présence du “multiple”: diversité des déterminations accidentelles, des existants, des modalités de devenir; multiplicité des opérations du vivant, etc. Le “multiple” est ce qui est génétiquement premier. L’ “un” se laisse aussi découvrir par l’expérience – l’unité de vie du vivant-homme, par exemple – et surtout par la saisie des causes propres de ce qui est: la subsistence (mode d’exister de la substance) unifie les déterminations substantielle et accidentelles de l’existant-homme; l’acte-vérité, et plus ultimement encore, l’acte-bonté unifient l’existant-homme; l’âme, acte du corps, donne son unité profonde au vivant corps-et-âme. Le devenir physique, riche d’une si grande diversité, connaît des “principes d’unité” très puissants (voir les interactions fondamentales ou les particules élémentaires). L’un est premier selon l’ordre de perfection… la contemplation ou l’amour d’amitié unifient profondément la personne humaine. L’un et le multiple sont coextensifs à l’être, des propriétés nécessaires de ce qui est en tant qu’être; l’un se tient du côté de l’être-en-acte, de l’être substantiel; le multiple s’enracine dans l’être-en-puissance, capable de multiples déterminations et de diversité de devenir. L’un remplit une fonction d’ordre: il unifie en ordonnant le multiple. La saisie de l’un et du multiple est un levier permettant d’induire les principes - causes de ce qui est; pensons à l’induction de l’âme à partir de l’unité de vie du vivant et de la diversité de ses opérations… voire même les “concepts” de mécanique ondulatoire (unifiant les notions “simplistes” et diverses d’onde et de corpuscule) ou le concept d’espace-temps.
Le multiple est au service de l’épanouissement de l’un-unité; et l’un-unité donne son harmonie au multiple.


PARTICIPATION ET CAUSALITE:

La participation est à la causalité ce que l’un est à l’être. La participation se comprend en fonction de l’un et de l’ordre qui en découle: celui qui participe est second relativement à celui dont il participe et qui est premier. Ainsi, la substance participe de l’exister de Celui qui est “l’Etre existant nécessaire”; l’intelligence, la volonté, participent (respectivement) de Celui qui est “Acte-vérité substantiel”, “Acte-bonté substantiel”; mais, cela ne peut se dire qu’en théologie naturelle, dans des jugements de sagesse. La “Via inventionis” demeure exclusivement dans l’ordre de la causalité; son fondement – l’expérience telle qu’elle est saisie à travers la connaissance sensible – l’exige.
Nous pouvons noter que le participant participe dans la mesure, où sa “potentialité” le lui permet; en ce sens, la “potentialité” limite sa participation… “Ce qui est reçu, est reçu à la manière et à la mesure de celui qui reçoit”.

LA PERSONNE HUMAINE

Au terme de la “Via inventionis”, nous pouvons comprendre ce qu’est la Personne humaine, l’être- existant le plus parfait que nous puissions expérimenter et connaître “de l’intérieur”. Elle est “ens per se”, être substantiel impliquant matière – par où elle est insérée dans l’Univers physique – et esprit en son âme immortelle; elle est “substantiellement une”: son ‘esse’ est unique, lui appartient, d’où un certain “égoïsme métaphysique”... qui est le fondement de son autonomie ( à ne pas confondre avec l’indépendance, qui se situe au niveau psychologique ... dans un’goulag’ l’autonomie subsiste, alors que l’indépendance est ‘morte’) .
La Personne n’est pas - ne doit pas être - ‘enfermée’ dans son ‘autonomie métaphysique’ ... au contraire, cette autonomie lui permet - doit lui permettre- une ouverture ‘illimitée’ à la conquête du vrai bonheur de l’homme. Par ses opérations spirituelles, la Personne est plongée dans un devenir spirituel, dans une croissance ‘plus ou moins réussie’; croissance finalisée, in fine, par la Contemplation et l’Amour d’amitié. L’intelligence va s’épanouir dans la recherche de la vérité ... recherche toujours en ‘mouvement’, toujours plus approfondie ... si la vérité actue notre intelligence, notre intelligence n’est jamais propriétaire de la ‘plénitude de la vérité’ ... (ne confondons pas ‘être vrai’, ‘agir en vérité’ et être sincère ... la sincérité est au niveau psychologique ... elle est le reflet de notre opinion souvent enténébrée.) La volonté va s’épanouir dans un amour vrai, plus profondément, dans l’amour d’amitié ... cet amour nous met en présence de la transcendance de l’ami, de son ‘originalité’ profonde ... deux dangers guettent ‘l’exercice de l’amitié : faire de l’autre un autre nous-même, ou, se laisser dénaturer par l’élément passionnel ... .
Cette ‘double’ finalité de la Personne humaine achève la personne, lui donne sa dimension la plus ‘verticale’ ... recherche de la vérité (fin immanente) et amour d’amitié (fin transcendante) cheminent en communion : “... vérité et amitié nous sont chères l’une et l’autre, mais c’est pour nous un devoir sacré d’accorder la préférence à la vérité.”(Aristote, Ethique à Nicomaque ... il n’hésite pas à s’opposer à son Maître et Ami sur tel ou tel point de vérité). Philosophiquement, la Sagesse - elle découvre et contemple l’Etre Premier - a un primat sur l’amitié ... l’ami ne peut être qu’une créature ! L’Etre Premier ne ‘manifeste’ pas Son amour. L’exercice de la Prudence-Sagesse pratique, les habitus d’art - regardant le faire - éclairent la ‘dimension horizontale’ de la Personne insérée dans un devenir personnel ‘concret’-incarné et communautaire ... sans oublier l’Unité substantiel du corps et de l’esprit (ni rejet ni adulation-adoration du corps).
Cette “saisie métaphysique” de la personne nous manifeste combien elle est esprit dans ce qu’elle a de plus propre; mais, aussi, elle nous manifeste ses limites: son être-exister est reçu (elle ne se le donne pas à elle-même, mais elle peut le garder) et elle est capable d’erreur et de mal, de manquer-rater son bonheur parfait. Aucune personne n’est parfaite… c’est pourquoi, la personne ne peut être finalisée (d’une manière ultime) ni par l’autre personne ni par la communauté des personnes (communauté qui demeure toujours quelque chose d’impersonnel).

Nous pouvons nous interroger: existe-t-il une personne qui soit son exister... ens a se ? qui soit acte pur (n’impliquant aucun élément potentiel), parfaitement une? Une telle personne ne peut être que bonté - vérité substantielle; sa contemplation est alors la finalité ultime, le bonheur parfait de la personne humaine.

THEOLOGIE NATURELLE

Preuves de l'existence d'un Etre premier, appelé Dieu

* Aucune des réalités existantes --- de l’Univers physique, du Soleil, des particules, à l’Univers des vivants et tout particulièrement à l’homme-vivant de Vie spirituelle --- ne se donne son exister-esse : elle le reçoit ... elle est en puissance à son exister ... elle ne fût pas, elle n’était pas, et elle fût (l’âge même de l’Univers est fini). Le principe de causalité permet d’affirmer qu’une Réalité première existe qui ne reçoit pas son esse-exister, qui est Acte esse dans toute sa pureté , sans aucune ‘potentialité’... “Ipsum esse subsistens”, “Ens a se”, Etre nécessaire en son esse-exister ... le seul Etre-existant qui puisse dire de lui-même : “Je suis Celui qui suis” ... la ‘définition’ que Dieu a donné de Lui-même à Moïse (cf.Gen.3.14)! L’Etre premier-Dieu est Source - Cause première de l’esse-exister de toute réalité. L’Etre premier-Dieu est Acte-esse parfait (sans aucune limite, puisque non reçu); toute autre réalité que Lui participe de Son esse-exister … de Son “énergie existentielle illimitée” peut-on dire dans un jugement de sagesse.

L’expérience que nous avons de notre vie selon l’esprit et la connaissance métaphysique de la personne et de l’Univers physique et des vivants, nous mettent en présence:
* de l’acte-vérité (vérité ontologique profonde médiatisée par la vérité formelle) : aucun étant-existant n’est substantiellement vérité : la personne humaine est toujours en cheminement-devenir, en croissance, de sa vérité profonde -- être vrai est très différent de être sincère, càd conforme à son-ses opinion(s) (qui peuvent être erronées!) -- ; notre connaissance de ce qui est en tant qu’être est en devenir ... ce devenir de la vérité formelle est signe de l’élément ‘en puissance’ conjoint à la vérité profonde de tout étant-existant. Le Principe de causalité permet de conclure : il existe un ‘Etant-existant’ substantiellement Vérité, Acte-vrai ‘absolu’ ... qui ne peut être autre que l’Acte-esse-parfait ... l’Acte-vérité EST ! L’Etre premier est Vérité substantielle, “Lumière parfaite” -- cf.1 Jn.1.5 : Dieu est Lumière - en Lui, aucune potentialité à l’erreur, aux ténébres; toute réalité autre que Lui participe de Sa lumière - Vérité, de Son “énergie lumineuse” peut-on dire dans un jugement de sagesse.
* de l’acte-bien-bonté qui n’est jamais parfait, toujours ouvert aux imperfections, égarements, au mal ; cet acte-bonté est ordonné, finalisé par un Acte-Bonté parfait, achevé, transcendant tout devenir, toute puissance. Cet Acte-Bonté , Source ultime et première de tout bien , est “un” avec l’Acte-esse et avec l’Acte-Vérité ... l’Acte-bien EST ! L’Etre premier est Bonté-Bien substantiel, “bonum per essentiam”, Amour - Don - cf. 1 Jn.4.8 : Dieu est Amour - et toute réalité spirituelle autre que Lui participe de Sa bonté - amour… de Son “énergie - amour” peut-on dire dans un jugement de sagesse.
Le rejet-refus de la finalité, de son exercice -- et donc du principe de causalité -- ne permet pas de conclure; ce refus est motivé, le plus souvent, par un ‘a priori’ d’ordre intellectuel-affectif ... Cf :Rm.1.19-20. Sans oublier que l’infini ne peut être traversé dans l’exercice de la causalité -- principe de non-régression à l’infini -- ce qui fait difficulté pour beaucoup (seul le mathématicien peut le traverser ... cf.les nombres transfinis de Cantror !!)

Considérant les deux grandes modalités du devenir propre au vivant et du devenir propre à l’Univers physique – nous pouvons affirmer:
* L’expérience nous enseigne qu’à l’origine de tout vivant, il y a un vivant - source; cette transmission d’un capital de vie, d’énergie vitale, n’est jamais parfaite, toujours limitée; le vivant n’est pas substantiellement vie; sa vie, il peut la perdre et il la perd. Aucun vivant de vie végétative-sensible n’est immortel; l’homme en sa vie spirituelle ‘touche’ à l’immortalité, sans être substantiellement vie ... l’élément potentiel est présent jusqu’à la fin de ses jours. Le principe de causalité nous permet de conclure : à l’origine première de la vie, à l’origine de toute vie, existe un Vivant parfait, substantiellement vie, purement Acte, au-delà de tout conditionnement, de tout compromis avec l’être en puissance. L’Etre premier-Dieu est Vie, Vivant parfait - Source de toute forme de vie... cf. Mt.16.16; Jn.14.6; 1 Jn.1.1 .
* L’expérience du devenir physique, universel, des rapports causes-effets dans l’ordre efficient, et le principe : ce qui est mû est mû par un autre -- nous permet de conclure à l’existence d’un Etre Premier Moteur, non mû, qui est Acte pur. L’Etre premier-Dieu est Moteur immobile, transcendant tout devenir et le finalisant, lui donnant son sens ultime.

L’Etre premier, appelé traditionnellement Dieu, est Acte pur (transcendant toute puissance ... acte-Esse), Acte parfait assumant toute perfection ( Vérité, Vivant, Moteur immobile), Acte achevé ayant sa fin en Lui-même (Bonté) : Contemplation de la contemplation (dixit Aristote!) . Il est souverainement et absolument Un (aucune multiplicité, division en lui).
L’Etre premier est Personne, Esprit… sans aucune compromission possible avec le mensonge, le mal. Cette découverte met le philosophe dans une attitude d’adoration face à la Majesté infinie de l’Etre premier… il comprend que toutes ses qualités – vie, vérité, bonté,…– sont participées des qualités “une” de l’Etre premier; cette découverte introduit le philosophe dans une contemplation aimante, silencieuse, “solitaire” de l’Etre premier… car, celui-ci ne se donne, comme Personne - Amour, qu’au travers d’une Révélation.
Les preuves de l’existence de l’Etre premier sont des raisonnements déductifs a posteriori (de l’existence des effets, ils remontent à l’existence de la Cause), ayant pour point de départ obligé l’expérience des réalités et de leurs devenirs (ce qui implique la médiation des sens) et pour “âme” la métaphysique de l’acte (un “sens aigu” de la finalité).

Les Attributs divins

Nous ne pouvons pas connaître ce qu’est l’Etre premier - Dieu en lui-même (son “quid est?”)… ce n’est que dans une Vision surnaturelle que nous pouvons Le voir tel qu’Il est (cf 1 Jn.3.2). Nous ne pouvons que préciser sa manière d’être-exister, sa manière de vivre, sa manière d’agir (son “comment - quomodo”), et cela à partir de ce que nous expérimentons, c’est-à-dire fondamentalement des réalités sensibles. L’Etre premier, Esprit pur, n’étant aucunement dans “le sensible”, ce n’est que par voie de négation (du “quomodo” des réalités sensibles) et d’éminence (d’achèvement, de perfection, du “quomodo non sit”), que nous pourrons préciser sa manière d’être, de vivre, d’agir. Nous contemplons alors les attributs divins; cette contemplation très intellectuelle (fine pointe de la vie de l’intelligence) – contemplation de sagesse, de lumière – met la joie dans le “coeur du philosophe”, lui donne un repos dans la lumière, en même temps qu’un jugement de sagesse sur les réalités existantes… mais, elle se distingue profondément (sans qu’il y ait opposition) de la Contemplation mystique du croyant.

Manière d’être de l’Etre premier
L’Etre premier, Acte pur, au-delà de toute composition, est absolument simple. Tout ce que nous expérimentons, y compris nous-même, implique une grande diversité de compositions: esse-exister et substance (ou “essence”, appelée ainsi dans un jugement de sagesse), nature humaine et tel corps humain en tant qu’individué par la “matière”, âme et corps, facultés et opérations, etc; aucune de ces compositions n’existe en l’Etre premier-Acte pur, d’où sa simplicité… mais, Sa simplicité est éminemment parfaite! Absolument simple, l’Etre premier est ineffable (au-delà de toute définition), incompréhensible et transcendant, séparé de tout ce qui n’est pas Lui. En les créatures, les compositions multiples et diverses sont une richesse; mais, aussi, nous connaissons les “nostalgies” d’une plus grande simplicité, d’une “simplification” de vie humaine et spirituelle; psychologiquement, l’homme est très complexe… souvent chaotique en sa vie mentale et affective… une authentique simplicité ne peut venir que de la Contemplation.
L’Etre premier, Acte parfait, au-delà de tout devenir, est souverainement parfait. Les perfections - à tout niveau de vie ou physique - que nous expérimentons représentent une très grande richesse d’être; mais, elles sont aussi toujours limitées (en acte, même si elles sont, en puissance, ouvertes à l’infini, pour les plus spirituelles). En l’Etre premier, ces limites n’existent aucunement et Sa perfection unique, assumant - intégrant toute perfection, se donne dans une absolue simplicité! La simplicité de l’Etre premier est souveraine perfection et Sa perfection est absolument simple. En les créatures, il existe une certaine tension entre simplicité et perfection; particulièrement sensible dans la vie spirituelle, mais aussi biologique. Souverainement parfait, l’Etre premier assume, dans Son absolue simplicité, les perfections propres à une personne… Sa perfection est celle d’une Personne, esprit pur… en ce sens, il est possible de parler de son intelligence ou de sa volonté, bien que ces dernières soient une avec “Je suis”!
L’Etre premier, Acte achevé, Cause finale ultime, est infiniment bon. Son Etre est bonté, substantiellement bon. Sa bonté se communique en attirant à elle les créatures “faites à Son image”… “bonum est diffusivum sui” (le bien est diffusif de soi). En les créatures spirituelles, la bonté n’est que participée, toujours limitée (en acte, même si elle est ouverte à l’infini, en puissance)… la bonté est qualité et non substance. En ces créatures, la bonté qui attire et se donne en attirant est distincte de la perfection… une créature parfaite peut manquer de bonté, ne pas attirer à elle… une créature aimable peut attirer même si elle n’est pas très parfaite. En l’Etre premier, Sa perfection est Sa bonté, et Sa bonté est Sa perfection.
Simplicité, perfection, bonté sont les lumières - vérités les plus profondes que le philosophe puisse avoir du “Mystère” de l’Etre premier; et ces trois “vérités-qualités substantielles” sont Une; l’Etre premier est Un (indivisé, unique). Acte pur, Acte parfait, Acte achevé: il est Un.

La personne humaine, les vivants, possèdent un corps par lequel ils sont intégrés dans l’Univers physique; les corps physiques ont des qualités propres: ils sont finis - limités, localisés - extériorisés les uns par rapport aux autres, soumis au devenir physique et au temps. Par voie de négation et d’éminence, nous pouvons préciser certains attributs divins; ceux-ci s’appuient sur les enseignements de la philosophie de la nature.
Le devenir physique, universel et divers, nous fait découvrir un principe - cause physique, pure puissance: la “matière première”, pouvoir être ouvert à l’infini, non limité… c’est là un infini de privation, de non-perfection; ce principe purement potentiel n’existe que dans les réalités physiques, uni à des déterminations - formes et à la quantité (par où ces réalités sont localisées). Les déterminations - formes sont distinctes entre elles et limitées par la potentialité de la matière en laquelle elles existent; cette limitation - finitude est une perfection. La forme, la détermination, en elle-même (donc non-reçue dans une puissance) est non limitée, non finie, “ouverte à l’infini”. L’Etre premier, Acte parfait, est infini, infini (sans limite aucune) en Sa perfection, en Sa bonté; il est “sans rival”, “inépuisable”; “le contempler” est se perdre en Lui. La personne humaine est finie en son acte-esse (reçu) et en ses qualités et perfections; elle n’est ouverte à l’infini qu’en ses facultés spirituelles, qui sont ordonnées, in fine, à la Contemplation de l’Etre premier.
La matière et la quantité conjointe (accident nécessaire de la matière) ont pour effet principal d’extérioriser les corps, de les localiser; être extériorisé, localisé, est une perfection pour les corps physiques et vivants. [N’imaginons pas “l’espace vide” préexistant à la matière … cet espace - localisation est “accident” nécessaire de la matière, car la quantité est accident nécessaire de la matière première (principe substantiel).] Une telle “perfection” ne peut aucunement convenir à l’Etre premier - Esprit pur. C’est par son action que l’Etre premier pénètre l’Univers des corps… là, où un être agit, exerce son action, là il est présent. L’action-agir de l’Etre premier, Acte pur, achevé, est sans limite, universelle… rien ne lui échappe… Nous saisissons l’attribut d’immensité, présence d’immensité (sans limite):
* l’Ens a se est source de tout esse-exister d’où une présence intime à tout existant… si cette présence était retirée, l’existant serait néantisé.
* l’Acte achevé, Bien substantiel, finalise et gouverne toutes les réalités… présence selon la fin atteignant son sommet en les réalités spirituelles (leur modalité d’agir “liberté” est intégrée, assumée dans ce gouvernement).
* l’Acte parfait agit aussi comme cause première efficiente “conjointe” aux opérations - actions de tout être créé, “conjointe” aux causes secondes dont elle respecte l’autonomie d’exercice (voulue par elle… son action n’est pas celle d’un déterminisme formel, rigide).

L’Etre premier, Acte pur - parfait - achevé, est au-delà de tout devenir: il est nécessairement immuable; son immutabilité substantielle est un repos dans l’infinie perfection, dans la Contemplation… nous en saisissons “quelques miettes” dans la contemplation philosophique, voire dans l’amour d’amitié. Etant immuable, l’Etre premier est “invulnérable”… il ne peut être soumis à un devenir causé par les créatures.
Le “déroulement” de tout devenir implique une “mesure”, un “nombrage” des “avant - après”… un temps, une durée: temps physique (des horloges diverses: mécanique, à quartz, atomique), temps physiologique, durée psychologique. L’Etre premier, immuable, est au-delà de toute mesure de temps: il est éternel; en Lui, il n’y a ni avant ni après, ni commencement, ni fin. L’éternité de l’Etre premier est “un éternel présent”… ce qui Le met au-delà de toute histoire. L’instant présent, en lequel nous vivons et exerçons nos opérations, est comme la “trace” de l’éternité divine dans le temps - durée, auquel nous sommes soumis. [Le temps physique est concréé avec la matière - énergie et mesure son devenir… ne l’imaginons pas “éternel” et préexistant à la matière - énergie.]

Manière de vivre de l’Etre premier
La vie se manifeste dans les opérations propres au vivant; mais, elle n’est pas quelque chose d’accidentel, puisqu’elle a sa source en l’âme, principe substantiel. C’est pourquoi, nous pouvons reconnaître l’Etre premier comme le Vivant, substantiellement Vie. De Sa vie infiniment parfaite, nous avons une “image”, un “analogué” dans la vie spirituelle de la personne humaine; or, celle-ci implique intelligence et volonté; c’est pourquoi, nous pouvons par analogie parler de l’Intelligence ou de la Volonté de l’Etre premier… en sachant bien qu’en Lui, intelligence et volonté sont une et identique à “Je suis”. Nous avons reconnu l’Etre premier comme Vérité substantielle, Amour substantiel; Sa vie est Contemplation aimante ou Amour contemplatif… Contemplation de la contemplation… Amour de l’amour… (Nous mesurons combien notre compréhension de Son “Mystère” craque… combien Son intimité de Vie est incompréhensible…)… Et cependant l’Etre premier n’est pas clos en Lui-même dans Son infinie Béatitude… Il Se communique, Se donne, Se fait connaître… En se connaissant Lui-même, Se contemplant, Il connaît toutes les réalités “issues de Lui”; rien ne Lui échappe de ce qu’elles sont, de ce qu’elles font (même pas les futurs contingents)… En S’aimant Lui-même, il aime toutes les réalités voulues par Lui d’un amour souverainement libre et gratuit et attire à Lui toutes celles qu’Il a voulu faire à Son image et à Sa ressemblance.

Manière d’agir de l’Etre premier
La causalité de l’Etre premier est première - fondamentale; elle s’exerce au niveau de l’être-exister, immédiatement, et atteint, en ce niveau, toute détermination, tout devenir; elle est universelle et se réalise “ex nihilo”… causalité de pur don… causalité créatrice manifestant la toute-puissance de l’Etre premier… cet acte créateur est au-delà de tout devenir et donc de temps - durée… La création artistique, technique, humaine implique toujours une “matière préexistante” et s’exerce dans un devenir impliquant une dimension temporelle.
La causalité de l’Etre premier est ultime - parfaite. Bonté substantielle, Acte achevé, l’Etre premier en Se communiquant, en créant, attire à Lui, de manières diverses, toutes les réalités existantes en les orientant vers leur fin… là, se manifeste Son gouvernement, Sa providence. (Si l’homme peut errer à cause de sa liberté, cela ne contredit pas la providence divine, qui a voulu précisément l’homme libre… et ne l’abandonne pas.)
La causalité de l’Etre premier est souverainement libre et gratuite. L’Etre premier est Sa béatitude… rien ne peut lui être ajouté, le perfectionner… les réalités existantes sont des purs effets de Sa causalité, voulus librement et aimés gratuitement.
Les qualités de la causalité de l’Etre premier – première - fondamentale (monarchique, pourrait-on dire), ultime - parfaite (aristocratique...sa pefection sans limite est manifestée par les multiples intermédiaires dont Il se sert, en les invitant à se ‘parfaire’), de pur don (libre et gratuite ... démocratique) – permettent de conclure: L’Etre premier est Créateur. L’acte de création est un acte métaphysique (transcendant tout devenir, tout temps), de pure contemplation, immédiatement efficace: “Que soit lumière - énergie, et fut la lumière - énergie”. L’Etre premier, Créateur, agit en Artiste souverain, d’où la beauté de l’Oeuvre créée, et en Père envers les créatures faites à Son image et ressemblance… en les créant, Il leur communique quelque chose de Son pouvoir d’artiste et de Sa paternité


ADDENDA: POUR LES CROYANTS

Pour le croyant, l’existence de Dieu, si elle ne lui est pas naturellement manifeste – “Depuis la création du monde, Ses perfections invisibles, éternelle puissance et divinité, sont visibles dans Ses oeuvres pour l’intelligence.” (Rm.1.20) – relève de la foi. Pour le croyant, le Mystère de la Très Sainte Trinité est le Mystère des mystères de la foi: Dieu-Père, Dieu-Fils et Dieu - Saint Esprit, Trois Personnes qui sont un seul Dieu. Le Père est “Je suis Celui qui suis” (Ex.3.14), le Fils est “Je suis Celui qui suis”, le Saint Esprit est “Je suis Celui qui suis”, et les Trois Personnes sont un seul “Je suis Celui qui suis”. Il en est de même de chacun des attributs divins. La distinction des Personnes est “discrètement” éclairée par l’opposition relative des relations de paternité, filiation, spiration commune et procession: la Paternité divine est la Personne du Père, la Filiation divine est la Personne du Fils, la Procession divine est la Personne du Saint Esprit…
La Révélation divine explicite et met en évidence des attributs divins, qui demeurent philosophiquement très cachés: sainteté, miséricorde, lumière (1Jn.1.5), amour (1Jn.4.8), vérité (Jn.15.26; 16.13), vie(Jn.14.6) … Le croyant est “proportionnellement” participant de ces attributs; en son sommet d’union: “L’âme est devenue dieu de Dieu, en participation de Son être et de Ses attributs.” (Jean de la Croix, Vive Flamme, str.3).
Cf. Valtorta :
La Charité qui agit-crée : la Toute-Puissance
La Charité qui enseigne : la Sagesse
La Charité qui pardonne : la Miséricorde
La Charité qui gouverne : la Providence
La Charité qui redresse - rectifie : la Justice


CRITIQUE

En préparation